Rentrée solennelle de l’UL : La rupture avec les étudiants
Vos humbles serviteurs, Sydney et moi-même Élie, nous nous sommes rendus pour vous à la Cérémonie Solennelle de l’Université de Lorraine (UL) ce mardi 29 septembre au Centre Prouvé à Nancy. Un choix de lieu un peu étrange pour un événement universitaire, bien que le Centre des Congrès s’avère être une sympathique œuvre d’architecture, on a du mal à évacuer cet étrange sentiment d’être deux clochards échoués au beau milieu d’une soirée mondaine (d’autant que Sydney était particulièrement mal sapé…). Pourtant, personne ne semble vouloir nous évacuer dehors et nous prenons donc place parmi les différents personnels, professeurs, doctorants et familles, attendant sagement le début de cette cérémonie qui, ô surprise, commencera en retard.
Au moins, l’université n’a pas fait les choses à moitié, se payant un superbe écrin orné de quelques décorations lumineuses du plus bel effet et une sonorisation qui parviendra presque à recouvrir les pleurs de nouveau-nés éclatant sporadiquement dans l’auditorium. Après l’entrée épique d’une procession de docteur en toges, Pierre Mutzenhardt, M Le Président de l’Université de Lorraine, donne le coup d’envoi avec un court discours introductif, rappelant les contextes de crise économique et de budget serré malgré lesquels l’UL tient à accomplir sa mission, je cite, de « service public ». Ainsi les chiffres s’enchaînent et on apprend par exemple que sur la session 2015/2016, nous serons plus de 56 000 étudiants, tous sites confondus (si quelqu’un a un projet de grosse soirée d’intégration, c’est le moment). Crise ou pas, M le Président annonce également qu’une somme de 9 millions d’€uros a été allouée à un projet de recherche pluridisciplinaire multilatérale dans le domaine de l’insuffisance cardiaque (qui intéresse apparemment M. Mutzenhardt à l’aube de la cinquantaine, pas de mauvais esprit, là aussi je cite.) Un projet qui se fera donc en collaboration entre autre avec le CNRS et le CHU de Nancy. Ambiance Cocorico, à tel point qu’on sera un peu amusés de devoir se lever au son de la Marseillaise, mauvais patriotes que nous sommes.
Mon sentiment de déclassement social finira par arriver à son paroxysme au moment de l’intervention de deux grands chercheurs émérites : Mervyn Bibb, professeur de microbiologie à l’Université de Norwich et Manfred Clauss, professeur en Histoire Ancienne à l’Université de Francfort (ou Stuttgart, les informations étant contradictoires, on ne sait plus très bien…). Deux cerveaux qui s’exprimeront chacun leur tour (en anglais pour Mervyn Bibb) avec humilité et humour avant d’être décoré au son de l’Hymne de leurs pays respectifs. Suivra la remise des doctorats et des prix de thèse où de jeunes étudiants montent sur scène pour recevoir leur précieux sésame, de manière fatalement plus impersonnelle, les doctorants étant nombreux.
Bref, vous l’avez compris, à partir de ce moment de la cérémonie, je dois avouer me sentir de moins en moins concerné par ce qu’il se passe, tant l’univers dans lequel je me retrouve alors plongé me semble aux antipodes de mon quotidien d’étudiant au sein de l’Université de Lorraine. Tout en ayant un énorme respect pour tous ces jeunes gens qui ont dédié près d’une décennie de leur vie à l’aboutissement d’un doctorat et d’une thèse, et plus encore pour ces deux chercheurs ayant mené des projets fascinants, je ne peux m’empêcher d’avoir l’impression d’être du mauvais coté de la cloison que le système universitaire dresse sans s’en rendre compte. L’impression d’entrapercevoir le sommet d’une pyramide depuis sa base. L’impression qu’il y a les étudiants, et les autres. Des étudiants qui sont d’ailleurs totalement absents de l’auditorium, renforçant cette désagréable impression de fracture. Alors j’essaye de relativiser et de me dire qu’après tout, rien n’empêche personne d’essayer de monter en haut de la pyramide. Mais si le sommet de la pyramide (quelques centaines d’étudiants) est plus petit que sa base (56 000 étudiants), c’est qu’ il y a probablement une raison.
Élie